Royaume Désuni
(Untied Kingdom)

Quelques années après le superbe Days, un nouveau roman de James Lovegrove est enfin publié dans nos contrées. Dire qu'il a été attendu par les amateurs du premier est un doux euphémisme ! Malheureusement, le résultat n'est pas forcément à la hauteur de l'attente et c'est bien dommage.
Après nous avoir baladés dans un gigastore, l'auteur va nous offrir une promenade dans une Angleterre dévastée par la guerre. On va y suivre en particulier le destin de Fen Morris, professeur d'un petit village, qui va partir à la recherche de son épouse Moira qui a été kidnappée avec d'autres femmes par un gang de Londres s'appelant les Bulldogs Anglais. Un parcours qui va s'avouer bien périlleux dans cette Grande-Bretagne chaotique.
L'un des premiers passages où le héros traverse son village, qui pourrait être ordinaire s'il n'était en aussi mauvais état, nous décrit parfaitement ce monde où l'électricité a disparue, où les magasins sont fermés faute de marchandise à vendre et où les voitures pourrissent dans les rues fautes d'essence pour avancer. Il offre une vision assez crépusculaire et nous en montre un peu plus la violence avec l'arrivée de ce gang qui va faire irruption durant une fête locale afin de tabasser les villageois et de s'emparer de quelques femmes. Cette ouverture est plutôt réussie car on ressent la brutalité de cet univers car on est aussi surpris que les personnages de cette attaque soudaine.

Notre héros devra donc partir à la recherche de sa femme avec qui il ne s'entendait plus. C'est sur ce postulat assez classique que va continuer notre roman. La principale originalité étant que le personnage principal n'est pas vraiment un guerrier en devenir, mais un simple instituteur qui n'a pas forcément grand chose de belliqueux en lui. Sa quête ne devrait qu'en être plus difficile mais il ne va pas tomber sur les péripéties qu'on aurait plus croire. Il va d'abord tomber sur un chauffeur de train d'origine pakistanaise, limogé parce qu'on avait plus besoin de lui mais qui a récupéré un train où il vit. Il tombera ensuite sur une secte vénérant un mauvais écrivain car ils ont l'espoir que la sortie de son prochain roman rétablira l'ordre et il fera bien d'autres rencontres encore... La quête de son amour perdu va donc prendre une tournure plus psychologique que physique. À travers ses rencontres et péripéties, il va comprendre le monde qui l'entoure et ses besoins. Il va subir une vraie quête initiatique qui va lui permettre de se trouver.
De l'autre coté, Moira va également connaître sa propre aventure. Si elle a été enlevée, ce n'est pas par hasard mais parce qu'elle est rousse. Elle pourrait plaire au chef des Bulldogs, un homme qui se fait appeler le Roi du Con mais qui se révélera bien plus subtil et intelligent que son pseudo le laisse supposer. Leur relation prend alors une tournure plus que prévisible et on n'attend plus qu'arrive l'inévitable. On découvre également les problèmes internes au camp et à la capitale anglaise qui croule sous les bombes et sous les guerres de gangs. Moira va aussi à sa manière effectuer un voyage où elle va également se découvrir.
Le principal défaut de ce roman, et qui n'est pas des moindres, est son absence de violence. Même lorsque le roman se situe à Londres, l'auteur semble vouloir regarder ailleurs. À de très rares exceptions, il fait référence au calvaire enduré par les villageoises qui ont atterri dans ce qu'il nomme "les maisons de récréation" des Bulldogs. Le roman reste presque trop sage à ce niveau et décrédibilise le chaos. On ne ressent jamais de véritable menace de la part de ce monde qui se devrait pourtant chaotique. Seul une sorte d'apocalypse final montre pour moi la vraie violence qu'on aurait du trouver dans ce roman.
Ce principal défaut est assez dérangeant et je doit avouer avoir eu du mal à rentrer dans ce roman pourtant original et intéressant au départ. Là où Days m'avait laissé sur les rotules, Royaume désuni m'a laissé perplexe à cause de son ambiance moins sombre. Mais il y a des idées plutôt originales comme ce personnage entièrement vert qui semble parfois orienter le héro ou celle selon laquelle l'Angleterre aurait sombré suite à une mauvaise décision politique, mais elles sont mal exploitées. L'histoire n'est cependant pas dénuée de personnage intéressants et de rebondissements. On arrive à suivre le parcours du héros avec un certain plaisir et certaines touches d'humour font vraiment rire. Sans que ce ne soit un mauvais roman, il lui manque un petit plus qui aurait pu en faire un grand livre.

Note : -/10
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Stegg



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