Le Miroir du Temps

Je venais à peine de refermer STYx, précédent ouvrage de l'auteur, quand j'ai attaqué le Miroir du temps de Jean-Michel Calvez. Attention, virage à droite très serré, STYx ne vous a très certainement pas préparé à ce que vous allez lire ici ! Phobiques des sciences, des théorèmes physiques et des démonstrations mathématiques vertigineuses, autant le dire tout de suite, passez votre chemin, ce livre n'est pas fait pour vous. Mais si vous vous sentez tout de même l'âme courageuse et le coeur aguerri, suivez-moi et je peux vous assurer que vous ne regretterez pas le voyage passionnant qui vous attend ! Et dans le pire des cas, vous risquerez juste de vous sentir un brin ridicule et ignorant à côté de l'auteur, mais bon, cela, c'est juste un détail, une simple histoire d'ego et on n'en meurt pas, après tout !
Väinö Kaupinnen est physicien, chercheur en optronique appliquée. Avec son collègue, Heini, ils vont faire une découverte capable de révolutionner le paysage scientifique actuel. Par hasard, ils découvrent un phénomène aberrant lié à la propagation de la lumière : le déplacement d'une masse par combinaison de lasers porteurs. Une sorte de transfert de matière ou de téléportation en rapport avec la vitesse de la lumière, à ce que j'en ai concrètement compris. Alors qu'ils se remettent à peine de cette découverte et ne savent pas vraiment qu'en faire, vu ses terrifiantes implications, Väinö est contacté par un de ses amis qui travaille en orbite sur un immense observatoire géostationnaire, Tycho Brahé. Ils ont effets découvert une planète dont la surface est un immense lac gelé formant un miroir géant et ont une idée folle: regarder la Terre par le biais de ce miroir géant grâce à une hyperlentille que vont concevoir les deux chercheurs et ainsi avoir une vision de la terre datant de près de 1000 ans (en raison de la vitesse de la lumière aller-retour de la terre au miroir). Une idée folle, terrifiante, vertigineuse mais peut-être possible en utilisant des technologies de pointe : Observer la terre comme elle l'était 1000 plus tôt, sans possibilité de revisionnage ni d'action et peut-être comprendre enfin certaines points de notre histoire.
A côté de cela il y a cette jeune fille étrange, Lo'rinn, arrivée on ne sait comment sur le sol grec, n'en connaissant ni la langue, ni les coutumes et qui va être hébergé par un vieux sage presque aveugle. Quels seront donc les liens entre Léonard de Vinci, la jeune Lo'rinn, les Plongeurs d'une planète lointaine vivant dans des souterrains étranges et aux rapports sensuels avec la lumière, une tribu pygmée, des combats aériens de la guerre 39-45 et les découvertes de Väinö sur "la modulation de vitesse de la lumière" ? La révélation sera terrifiante, inconcevable et vertigineuse. Absolument incroyable !

Passées les difficultés d'ordre technique et l'abondance de notions scientifiques présentes dans ce roman, le Miroir du temps est passionnant. C'est un roman ardu, un roman dense, très dense qui demande une réelle implication du lecteur. Le Miroir du temps n'est pas un roman divertissant, du genre que l'on prend pour se détendre, absolument pas. Ouvrir ce roman pour reprendre une lecture interrompue demande un réel engagement car on sait que l'on va presque en souffrir, du moins on va réfléchir, et même beaucoup réfléchir ! Pour mon compte, je suis loin d'avoir tout compris, et pourtant j'ai essayé ! Mais j'en ai compris assez pour être terrifiée, subjuguée et passionnée par ce que contient cet ouvrage ! Jean-Michel Calvez nous entraîne vraiment très loin. Loin dans les extrapolations, loin dans les technologie de pointes et les sciences physiques, bien trop loin pour que je puisse me décider, rationaliser ce roman et me dire: ok, cela c'est possible, cela ce ne l'est pas. En toute franchise, j'en suis tout bonnement incapable... Et c'est aussi cela qui est si passionnant ! On est constamment à la frontière entre l'anticipation, la science-fiction et le documentaire scientifique, je dirais presque. Les perspectives intellectuelles que nous offre l'auteur sont tout bonnement effarantes et il me faudrait des années, je crois bien, pour envisager tout ce que cache ce roman en hypothèses, en intrication, en déduction et en possibilités physiques, scientifiques, historiques, éthiques et ontologiques.
Ce livre est un vrai casse-tête qu'on aime démêler, un problème théorique qui nous donne à réfléchir, sur nous-mêmes, sur notre rapport au monde et sur notre place dans cet univers si inconnu, et surtout sur les conséquences de nos actes. Entre science-fiction, uchronie et parfois même fantasy sur certains passages, Jean-Michel Calvez tisse une trame extrêmement complexe, un roman tout en effets miroir, et en résonances symboliques. On est plongé dans ce roman et malgré son côté un peu bavard qui serait le seul reproche que je pourrais lui faire, un peu trop explicatif et rébarbatif peut-être, on ne peut le refermer. On est happés par un vertige grandissant de pages en pages et on s'engage corps et âme dans ce roman qu'on sent presque trop grand pour nous, petites choses incultes. Franchement, lire le Miroir du Temps de Jean-Michel Calvez, c'est apprendre quelque chose, c'est vous sentir tout petit devant les mystères de l'univers et finalement humble devant l'infiniment grand, l'intouchable, voire l'impensable... le Miroir du temps est un roman franchement innovant, original et très intelligent. Une sorte d'ovnis littéraire à l'austérité trompeuse qui vous happe pour ne plus vous lâcher.
Vous l'aurez compris ce roman soulève une infinitude de questions. Le rapport à l'autre, connu ou inconnu : peut-on détruire l'autre sans même le connaître, quel est le poids de nos actes, quelles peuvent être les répercussions de nos erreurs à la dimension de l'univers ? Et beaucoup d'autres, très certainement, selon sa sensibilité. Le mot qui qualifie le mieux ce roman à mes yeux est "vertige". Vertige des sens, vertige de l'esprit devant les idées folles qui nous sont proposées, devant les implications qui leur sont inhérentes et dont on ne peut qu'envisager qu'une infime partie faute de posséder les connaissances nécessaires à leur parfaite compréhension. Je ne saurais que vous conseiller de dépasser la difficulté première du roman pour vous y investir, je peux vous garantir que vous ne le regretterez pas et que vous aurez du mal à oublier ce roman. Chapeau bas, M. Calvez, vous m'avez sidérée...

Note : 8,5/10
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Chaperon Rouge



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