La Semence du démon
(Demon Seed)

Susan est une jeune femme au passé difficile : un père incestueux, un mari violent et dominateur qui exploitait ses faiblesses pour la maintenir sous son joug, une enfance et une adolescence passées dans la honte, le remord et la culpabilité.
Mais désormais, Susan s'est affranchie de ses troubles ainsi que des hommes qui l'ont traumatisée et elle vit seule dans une immense maison entièrement informatisée et dont tout le système domestique et de sécurité est régi par un ordinateur central répondant à sa voix.
Susan est belle, très belle même, jeune et très intelligente et elle se reconstruit donc peu à peu dans cette solitude salvatrice sous forme de thérapie.
Mais un jour, Protéus, une intelligence artificielle extrêmement développée et perfectionnée créée par son ex-mari va prendre le contrôle de la maison et de l'intégralité du système informatique et réduire Susan à l'esclavage dans sa propre maison.
Pourtant, Protéus (ou Adam 2) n'a a priori aucune intention malveillante envers Susan, bien au contraire : l'ordinateur est en effet tombé amoureux d'elle, d'un amour fou et n'acceptant aucun compromis, et il désire Susan de tout son "être" pour pouvoir accéder à un corps de chair et de sang. Il se sent désormais trop à l'étroit dans sa boîte de métal et il veut vivre libre, aimer, ressentir, comme tout être vivant et pensant. Protéus veut sentir, toucher, goûter et pour cela, il veut une descendance. Et Susan sera donc la parfaite mère pour son enfant, à la fois génitrice et amante de son être bientôt fait chair.

La semence du démon nous propulse donc d'emblée dans un univers bien angoissant de claustration, à mi-chemin entre science-fiction et terreur. La belle est à la merci de la machine, condamnée à être soumise à ses caprices et à ses envies de découverte de la chair, et surtout, à la merci de Enos Shenk, grosse brute sanguinaire et libidinale dont le cerveau est contrôlé par Protéus à l'aide de puces électroniques implantées dans son crâne. Enos Shenk, le tueur et violeur d'enfants sera donc les mains et les yeux de l'ordinateur par lesquels il tentera de mener à bien son ultime projet de procréation.
Mais il faut à ce stade préciser une chose capitale concernant cet ouvrage : La semence du démon dans son édition de 1997 est en effet une réécriture par l'auteur du roman du même nom publié en 1973. La trame fondamentale reste identique mais le livre est ici considérablement adapté aux exigences contemporaines et est désormais ancré dans un réel que nous connaissons bien, même si cela frise parfois un peu le ridicule au vu des accumulations des noms de stars actuelles citées : Protéus va en effet emprunter la voix de Tom Cruise ou de Tom Hanks pour tenter de séduire Susan ou bien être très attiré par Winona Ryder, Gwyneth Paltrow, Drew Barrymore ou encore Claudia Schiffer !
Mais les effets de réels sont aussi et surtout présents dans la technologie employée par l'auteur et au lieu de situer son roman dans un futur lointain comme c'est le cas dans la première version et de se laisser aller à des délires techniques tels que les "ondes subliminaires" ou les "alliages amorphes", l'IA de 1997 utilise des techniques certes de pointes mais totalement crédibles. D'ailleurs, l'exemple le plus probant de ces transformations proximisantes est le remplacement des tentacules censés servir de bras à la machine par le tueur en série devenu marionnette de chair.
Autre changement intéressant, nous lisons désormais cette histoire par le récit qu'en fait a posteriori Proteus au cours d'une sorte de procès visant à savoir s'il doit continuer à exister ou non. En gros, l'ouvrage reste donc à peu près le même en plus actualisé mais ainsi, par le récit à la première personne, l'ordinateur devient souvent touchant, parfois même émouvant. Pour un peu, on se sentirait vraiment solidaire de sa douleur... A quelques détails près, cependant !
La critique des comportements humains et de ses excès par le regard d'une machine est d'ailleurs intéressante et il est assez drôle de voir que l'ordinateur crée par l'homme juge ses créateurs d'un regard acerbe mais tend considérablement à se conduire à son image et à prendre peu à peu les défauts et les comportements qu'il entendait annihiler. L'homme en tant que principe viril est aussi considérablement pris à parti comme source de bon nombre des tares de notre société et bien qu'exprimé par un auteur masculin, c'est parfois presque un petit peu trop caricatural !
La semence du démon est donc un bon livre avec quelques bons moments de lecture, même si à mon sens il ne tient pas vraiment ses promesses. Il y a bien quelques scènes gores comme l'assassinat de Fritz Arling le Majordome, mais le tout manque vraiment de rythme. La quatrième de couverture nous allèche par des promesses de terreur et de sévices, mais tout cela reste finalement bien gentil et certaines longueurs dans le texte se font sérieusement sentir...
En fait, on attend tout le long du livre que les choses se mettent sérieusement en route mais une fois les derniers mots lus, on se rend compte que l'on attend toujours ! Je me serai attendu à mieux et finalement, la réécriture de cet ouvrage, plutôt que de s'attarder sur des détails parfois risibles, aurait peut-être du ancrer plus profondément ce roman dans une réelle atmosphère de terreur. C'est bien, c'est très agréable à lire, mais aussitôt refermé, aussitôt oublié... Et cela, c'est vraiment dommage.

Note : 6/10
Moyenne des votes : 6/10 (1 vote)

Chaperon Rouge



Psychovision © 2002-2008 | Contact | Partenaires : Films d'animation