Psychose
(Psycho)

Bien avant "Le Silence des Agneaux", le livre qui inspira une multitude d'ouvrages de fiction autour du thème des tueurs en série, Robert Bloch écrivit Psychose. La recherche psychologique est si juste que ce livre pourrait presque faire figure de portrait non-fictif et constitue assurément l'un des meilleurs romans du genre. Rien que toute l'introduction concernant Mary est un véritable exercice de style et de construction, doublé d'une ambiance envoûtante.
Les premières pages du livre nous plongent directement dans l'esprit de Norman Bates, un homme d'âge moyen, solitaire, aux pensées morbides et vivant encore sous la coupe de sa mère. Un climat malsain est installé dès qu'elle interrompt le flot de ses pensées lui faisant mille reproches, le rabaissant au même niveau que la crasse traînant par terre. Ses paroles résonnent de haine et de frustration, dépeignant sa personnalité castratrice de façon douloureuse. Le dialogue devient un monologue et on se demande comment Norman a fait pour la supporter toutes ces années, s'il n'en aurait pas besoin pour se rassurer sur sa propre personnalité masochiste. Mais lorsqu'ils sont interrompus par la sonnette indiquant qu'un client vient d'arriver au motel, Norman reprend le contrôle de la situation, envoyant sa mère balader, contrastant subtilement avec sa soumission.

Le point de vue change et Mary nous est présentée. Elle a volé une grosse somme à son patron, voyant là une chance de refaire sa vie avec son fiancé, Sam Loomis, héritier de la quincaillerie criblée de dettes de son père. Bloch nous parle d'elle en des termes tout à fait sympathiques, nous ralliant à sa cause. On n'a pas envie de porter jugement étant donné qu'on serait tenté de faire la même chose. Norman invite Mary à prendre un dîner léger dans la maison qu'il partage avec sa mère. Durant le repas, sa véritable nature fait surface, instaurant un climat angoissant qui ira croissant jusqu'à la dernière page. Malgré cela, on ne peut s'empêcher de le plaindre, Norman, cet homme grassouillet, presque chauve, avec des lunettes et une personnalité douce, prévenante et maladroite. Son personnage est en cela particulièrement bien construit, aidé par l'écriture fluide et directe d'un Robert Bloch au meilleur de sa forme.
Sa brève conversation avec Norman l'ayant aidé à rassembler ses pensées, Mary change d'avis et décide de rentrer le lendemain afin de remettre l'argent sur le bureau de son patron. Mais avant, elle décide de prendre une douche. Norman l'observe à travers un trou dans le mur, ses pensées intimes dévoilant toute l'étendue de sa perversité. Il voit sa mère entrer dans la chambre de Mary et perd connaissance. III-III-III ! Exit Mary.
L'histoire prend désormais une tournure plus classique tandis que nous faisons connaissance avec Sam Loomis et Lila. Tous les soupçons se portent sur Sam, mais il devient rapidement évident qu'il n'y est pour rien. Les recherches concernant Mary stagnent jusqu'à l'arrivée d'Arbogast. Il va parcourir le comté et découvrir le Bates Motel, le dernier endroit sur sa liste et aussi son dernier endroit de repos. Norman commence à s'inquiéter de toutes ces recherches malgré les précautions prises afin de dissimuler les preuves. Nous descendons de plus en plus profondément dans son esprit malade, mais comme dans le film, la terrible vérité ne sera dévoilée qu'à la toute fin, réservant une surprise de taille aux non-initiés.
Bloch s'est inspiré d'un personnage bien réel pour son Norman Bates : le tueur en série Ed Gein, qui avait une obsession malsaine avec sa mère dominatrice, déterrait des cadavres et se fabriquait des objets utiles avec la peau. Des rumeurs faisaient également de lui un cannibale supposé mais aucune preuve réelle n'est jamais venue étayer ces dires. Gein fut arrêté en 1957 et à cette époque, la population n'était pas encore au fait des tueurs en série à la psyché déviante. L'incompréhension régnait dans des esprits terriblement choqués par ce que l'un des leurs avait été capable de faire et encore aujourd'hui, la population de la petite ville où vivait Gein souffre de ces souvenirs sanglants.
Psychose est un livre excellent et différent du film en ce qu'on suit l'histoire à travers plusieurs points de vue. Les passages concernant Norman seul et Norman et sa mère sont réellement effrayants et si bien écrits qu'on dirait que les mots découlent directement de la main de Norman lui-même. Nous sommes là, avec lui, dans cette vieille demeure que l'on imagine sèche et triste, une maison où la solitude pèse sur les meubles et salit les murs. Norman réfléchit beaucoup et n'a personne d'autre à qui parler que soi-même. Une schizophrénie galopante s'est emparée de son esprit, ayant tout loisir de se développer dans les ténèbres de son existence. Le résultat en est une descente terrifiante dans les méandres d'un esprit humain particulièrement dérangé que l'on n'est pas près d'oublier.
Le seul problème lorsqu'on lit un livre ayant fait l'objet d'une adaptation cinématographique est que l'on ne peut éviter les comparaisons. Ceci devient quasiment impossible dans le cas où le film est un vrai chef d'oeuvre, les personnages si bien campés que l'acteur devient indissociable de son rôle. On continue de les voir dans notre esprit en lisant, ainsi que les décors. Et on est souvent très déçu. Mais ce n'est pas le cas ici, ce qui ne fait que confirmer le talent indiscutable de Sir Alfred Hitchcock. Je dirais même que le livre complète le film dans le sens où pas mal de choses ont été coupées pour des raisons évidentes mais qu'elles nous permettent de souffler un peu et surtout, augmenter la tension jusqu'à la fin... Ah, cette fin... Terrible !

Note : 10/10
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ZombiGirl



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