La Huitième couleur
(The Colour of Magic)
Bienvenus sur le Disque-Monde, la seule sphère habitée et portée dans l'univers à dos de tortue stellaire, la grande A'Tuin, qui elle-même porte sur son dos quatre éléphants géants, qui eux-mêmes portent le Disque sur lequel se déroule cette histoire.
Bienvenus dans l'univers déjanté de Terry Pratchett dont le roman La huitième couleur inaugure les Annales du Disque-Monde qui est en aujourd'hui à son vingt-huitième tome (vingt six en traduction française) pour le plus grand bonheur de ses fans toujours plus nombreux dans le monde entier.
Comme l'indique le titre original de cette première visite sur le Disque, nous allons donc parler de magie. Et plus précisément de la couleur de la magie : l'octarine, la huitième couleur, mélange indéfinissable de bons nombres des nôtres, celle qui apparaît dès qu'il y a de l'occultisme dans l'air.
Et la magie, ce sont les mages qui la pratiquent (et aussi les sorcières comme nous le verrons plus tard, mais là n'est pas encore le problème). Mais pour la pratiquer correctement, on attend d'eux qu'ils réussissent brillamment leurs examens à l'Université de l'Invisible, condition sine qua non pour être reconnu dans la profession. Et c'est là que le bât blesse pour Rincevent, mage s'il en est, du moins dans la parure, car le hic, c'est qu'il n'a jamais pu parvenir à retenir un seul sortilège durant toutes ses années de formation à l'université.
Mais attention, pas seulement par pure bêtise ou complète inaptitude, non, non, mais plutôt par la faute de l'un des neufs plus grands sortilèges de toute la création du Disque qui n'a rien trouvé de mieux que de se loger dans sa tête et de n’en plus bouger. Pourtant, il était bien dans son In-Octavo, le livre magique sensé les contenir tous les neufs, mais non, le huitième sortilège a décidé de bondir dans la tête du malheureux Rincevent et depuis ce jour, celui-ci ne peut plus retenir aucun autre sortilège, aucune autre incantation. Plus assez de place dans son esprit, paraît-il...
Alors imaginez la tête de notre mage raté lorsque débarque dans sa ville d'Ankh-Morpork, un étranger venu de très loin sur le Disque. Un petit homme bizarre venu découvrir du pays, plein aux as, curieux de tout et armé d'un étrange appareil à dessiner des paysages qui ressemble très fort à ce que nous appelons chez nous un appareil photo (certes, le petit diablotin peintre en moins). Un touriste. Du jamais vu à Ankh-Morpok ! Un touriste venu voir du "pittoresque" et du "folklorique" et qui commet l'imprudence d'embaucher Rincevent comme guide durant la durée de son séjour.
Et du pittoresque, il va en voir, croyez-moi ! D'autant plus que, fait non négligeable, le touriste est accompagné d'un Bagage magique monté sur des centaines de petites jambes qui le suivrait jusqu'entre les morts s'il le fallait (et il le faudra d'ailleurs très certainement) et qui a la très mauvaise manie de montrer des dents et d'engloutir quiconque a le malheur de l'approcher d'un peu trop près.
Vous l'aurez donc compris, La huitième couleur ne ressemble à rien de ce que vous avez pu lire auparavant dans le domaine de la fantasy. Pourtant, tout y est : des mages, des trolls, des voleurs, des guerriers, des vierges en détresse, etc. Mais pourtant, il y a comme un petit quelque chose qui a ici un goût de jamais vu : une pointe d'ironie et de dérision, une louchée d'humour potache et une pincé de parodie, peut-être...
Toujours est-il que La huitième couleur est irrésistible. Les personnages sont vraiment très drôles, extrêmement sympathiques et jamais caricaturaux. Les situations sont cocasses et le style est enlevé, jubilatoire. Pratchett connaît son domaine et son sujet et il en joue avec maestria : il détourne pour notre plus grand plaisir les codes de la Fantasy et s'empare avec humour aussi bien de ses travers que de ses qualités et inaugure ainsi le style de la Light Fantasy.
Et en effet, c'est très léger. Ici, rien ne viendra vous donner une migraine à force de spéculations métaphysiques sur les potentialités de notre univers, rien ne vous empêchera de dormir en vous faisant vous retourner sans fin dans votre lit, hanté par la vision cauchemardesque d'une créature terrorisante. Non. Mais en échange, vous passerez un bon moment. Un vrai moment de détente où l'on ne demande rien d'autre qu'à se laisser emporter par les aventures délirantes des héros et à se réjouir des bons mots de Terry Pratchett.
C'est sûr, si vous recherchez de la littérature intellectuelle, passez votre chemin. Quoique... Humour et légèreté ne riment pas ici forcément avec stupidité car derrière les apparences drolatiques se cachent en fait une grande connaissance de toutes les littératures de l'imaginaire et un véritable talent de créateur de monde. La parodie et l'humour sont des arts à part entière et il serait impossible, que l'on aime ou non cette littérature, de nier à Terry Pratchett un grand talent de conteur et d'humoriste.
Alors si un jour de grande déprime vous broyez du noir, au lieu de ruminer jetez-vous sur les Annales du Disque-Monde : elles devraient au moins vous arracher un sourire et cela, c'est déjà beaucoup...
Note : 7,5/10
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Chaperon Rouge
Avis des visiteurs :
- Personnellement j'ai vraiment eut du mal a rentrer dans le roman, certes c'est plutôt drôle (mais moins que ce que j'espérai), les deux héros sont attachants mais je trouve qu'il manque un but (à part celui de survivre) ou une quête pour ces deux personnages, en fait on suit juste une accumulation de péripéties... ça n'a rien de désagréable mais il manque un petit quelque chose pour réellement accroché le lecteur que je suis ! De plus la fin n'arrange rien, vu qu'il n'y en a pas vraiment, on est obligé en fait de lire la suite pour pouvoir donner un avis définitif sur l'ensemble, je trouve que ça aurait été plus judicieux de créer une vraie fin avec une ouverture pour la suite...
Note : 7/10 (.: gregore :.)