La Guerre des mondes
(War of the worls)

Tout semble avoir déjà été dit sur Wells, son rôle de précurseur, son génie d'anticipation, son style fabuleux. Tout semble avoir déjà été fait au cinéma, à la télé et à la radio. Wells est l'un des fondateurs de la science fiction contemporaine et certainement l'un de ses plus grands génies.
La guerre des mondes est un de ces ouvrages qu'on lit à différents moments de sa vie : jeune on remarque la cruauté des méchants martiens, plus tard on découvre le propos philosophique de cet ouvrage et sa teneur métaphysique.
Ce qui reste stupéfiant, c'est la façon d'on l'oeuvre ressurgit dès qu'un état de crise mondiale s'installe. En 1938, Orson Welles l'adapte pour la radio, comme une image d'un monde qui agonise, sur fond de barbarie humaine et d'inutile guerre. En 1953, George Pal l'adapte dans un très fort climat de paranoïa et de guerre froide, où martiens riment avec communiste et attaque nucléaire. Plus près de nous, c'est Spielberg qui s'en va dénaturer l'oeuvre, sur fond d'attaque terroriste et de réplique Bush ! Il faut dire que La guerre des mondes décrit parfaitement ce que pourrait être une guerre atroce, a tel point que les scènes d'exodes que nous décrit l'auteur peuvent être comparées à celles qui surviendront quelques années plus tard pendant les deux conflits mondiaux. Ca, c'est ce que l'on appelle de l'anticipation, comparable à l'autre père fondateur de la SF moderne, Jules Vernes. A ceci près que Vernes avait dans ses écrits une portée plus néo-technologie que Wells dans la guerre des mondes. Ce qui ne veut pas dire que les livres de Jules Vernes ne sont pas eux aussi enclins à une certaine réflexion dite philosophique : pour s'en convaincre, il ne suffit que de lire 20 000 lieux sous les mers.
Mais revenons en à La guerre des mondes, si vous le voulez bien. L'histoire est bien connue. La société bien tranquille, société du métro boulot dodo, la société nouvellement industrielle et plus particulièrement la société anglaise, qui en cette fin de XIXème siècle est l'empire colonialiste le plus puissant et le plus grand du monde, va être bouleversée par le plus important conflit de tous les temps : l'invasion des extraterrestres ! Le décor est planté et c'est ça le plus important dans l'oeuvre de Wells. Car le décor, c'est ce qui va être détruit, cette société industrielle, c'est ce qui va être mis au banc ; cette pseudo invulnérabilité d'un état guerrier et militaire (n'en déplaise à nos voisins british !) va être anéantie, replaçant l'Homme dans le contexte qui est le sien, même surarmé et suréquipé : l'Homme est un animal qui ne dépend que de la nature et de lui-même...
Je m'explique. Lorsque l'invasion extraterrestre arrive, l'armée est balayée, les hommes, qui sont faces à ces machines venues de l'espace sont comme des fourmis ou des lapins pris dans un terrier face à un chasseur démoniaque. Ils ne peuvent plus que compter sur eux-mêmes. Et que se passe-t-il ? Ils sont désorganisés, perdus et même près à se bouffer entre eux. L'homme est un loup pour l'homme !

Fourmis, lapins etc... Le lecteur attentif remarquera que les animaux sont en fait très présents dans cet ouvrage de Wells. Non pas comme des alliés mais comme des images qui ponctuent le récit. Images des fourmis écrasées par l'homme, parallèle que fait le narrateur entre lui et les martiens. Cette guerre des mondes, c'est la lutte de l'infiniment grand contre l'infiniment petit. C'est l'enchevêtrement de mondes qui jusque alors s'ignoraient, restant inaccessibles pour l'un comme pour l'autre mais qui, fatalement, entrent en guerre.
Toujours sur ces animaux, regardez comment les chauves souris qui apparaissent ici et là au détour des phrases montrent plus d'entrain quant à leur survie que les hommes eux-mêmes. Des mondes, il y en a beaucoup et celui de l'homme n'est pas le plus enclin à la survie...
Le style de Wells est tout bonnement fabuleux car clair, précis, scientifique, il arrive à faire passer au détour d'actions et de trajets des idées fortes que seul l'homme poussé jusque dans ces derniers retranchements peu ressentir. Imaginez ce narrateur, prisonnier comme un lapin dans une maison qui vient de s'écrouler, qui est presque résigné à manger un chien pour survivre. Car ils sont là, partout, plus grands plus forts, les extraterrestres !
Les descriptions que donne Wells des extraterrestres sont très précises, voire scientifiques, comme cette explication qu'il donne quand à la différence gravitationnelle entre la planète Mars et la Terre. Cependant, dans mon esprit, et au vue de la façon dont le narrateur raconte son histoire, le martien reste cette "chose" inexplicable, quasiment invisible, venue de l'au-delà prête à fondre sur la terre, comme un mystère apocalyptique qui envahirait et détruirait l'espèce humaine.
Mais la pire des catastrophes n'est peut-être pas cette invasion, mais le fait que la raison humaine fuit peu à peu, nous montrant que dans la peur et la panique, l'humanité n'est pas solidaire et que l'on est pas tous frères.
Le narrateur fait deux rencontres, à mon avis très importantes. Tout d'abord un soldat. Grâce à ce personnage, on découvre vite l'inefficacité de l'armée et de l'état face à la catastrophe. Il raisonne ici comme des échos d'événements encore bien présents dans notre esprit... Je vous laisse réfléchir. Ce soldat, se rendant compte de la vulnérabilité de l'armée, comprend bien vite qu'il ne sert à rien de lutter mais qu'il vaut mieux plutôt s'adapter et faire en sorte que la vie continue. Raisonnement animal et analyse précise de ce que l'on nomme aujourd'hui le cerveau reptilien. Second personnage rencontré et lui aussi très important, un curé. Mais voilà, la foie ne sauve pas de la folie et Dieu n'existe pas.
Vous l'aurez compris, La guerre des mondes est un chef-d'oeuvre d'intelligence et de style. Rarement livre de science-fiction n'aura été plus important et plus primordial, au même titre que l'Iliade ou l'Odyssée, au même titre que toutes les grandes oeuvres de fictions qui sont entrées dans le patrimoine mondial. Un chef-d'oeuvre qui a fait son petit bonhomme de chemin écrit il y a longtemps déjà et qui reste pourtant d'actualité. Un livre qui fait du bien, qui nous replace là ou nous sommes entre l'infiniment grand et l'infiniment petit.
Un livre sur les "ET" bien plus intéressant que la piteuse et désastreuse dernière adaptation faîtes à la sauce "Busherie" par Spielberg... Le phénomène "ET" n'a pas fini de nous enivrer, nous faisant prendre une autre place dans l'univers, et lorsque nous jetons un regard vers les étoiles, nous comprenons alors qui nous sommes. Seul la Terre nous sauvera en se sauvant elle-même... Si vous lisez ce livre jusqu'au bout vous comprendrez. Fabuleux, loin, très loin de la SF bas de gamme type Independance Day, un must, un chef d'oeuvre !

Note : 10/10
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Cruisader



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