Le Grand Livre
(Doomsday Book)

Avertissement : Si vous n'avez jamais approché le cynisme de près, ne vous risquez pas dans l'univers de Connie Willis.Nous sommes au XXIème siècle. Les vacances de Noël approchent. Et Gilchrist, qui remplace le recteur de l'université d'histoire, parti en vacances on ne sait où, se précipite pour déclassifier le Moyen-Âge et y envoyer une jeune historienne inexpérimentée. Car en ce siècle, les historiens se servent de transmetteurs temporels pour explorer les périodes qui les intéressent.
La jeune historienne en question, c'est Kivrin. Elle a toujours rêvé d'aller au Moyen-Âge. Et là elle va se retrouver en l'an de grâce 1320, dans de petits hameaux d'Angleterre. Seulement voilà, il y a un problème. Mr Gilchrist est incompétent. Il n'a pas fait les tests préalables avant l'envoi de Kivrin en 1320. Elle peut avoir été décalée de plusieurs années.
Mr Dunworthy n'est plus tout jeune et il se fait beaucoup de souci pour Kivrin. Celle-ci est venue lui demander de la former. Alors il a fait de son mieux. Elle connaît le moyen anglais, le latin, l'allemand de l'époque. Le docteur Ahrens l'a vaccinée, y compris contre la peste, bien qu'elle ne doive survenir qu'en 1348, 28 ans plus tard. Et Gilchrist prétend qu'il a tout prévu.
Mais comme vous savez, quand on a prévu tout ce que l'on peut imaginer, on a oublier de prévoir le pire : ce qui nous semble impossible...

Je me limite volontairement à ne vous révéler que très peu de l'intrigue, sans quoi vous perdriez bien du plaisir à lire ce détonnant bouquin.
Ce n'est pas le premier livre que je lis de Connie Willis, et je dois avouer que quelque chose me dérange dans ses livres. Son écriture est beaucoup trop simple. Ou plutôt elle a l'air beaucoup trop simple et facile. Parce qu'en fait, quand vous plongez dans son univers, vous découvrez des personnages plus déments les uns que les autres, au sens le plus quotidien du terme. Ce qui préside dans ses livres, c'est une sorte d'absurde de la vie quotidienne.
Que dire de Mme Meager, la mère d'un élève du Professeur Dunworthy, qui harcèle le monde entier pour prouver que personne ne protège son fils. Parce que selon elle il ne devrait pas faire de sport (trop dangereux. Il risque de prendre froid), ni vivre seul (il faut que quelqu'un s'occupe de lui, lui fasse la cuisine et lui dise comment s'habiller) ni trop travailler (ce n'est pas bon pour la santé). Mais attendez de lire le livre et vous verrez à quel point elle est terrifiante.
Quant à Gilchrist. Oh Mon Dieu ! Ayez pitié de nous. L'imbécillité incarnée ! La prétention, l'incompétence, le besoin de prouver aux autres qu'il vaut mieux que tout le monde. Sans compter la schizophrénie parce qu'il voit les mêmes motivations chez les autres... alors vous imaginez d'ici les décisions qu'il est capable de prendre.
Le Grand Livre est habité d'une ironie persistante, et d'une lame de fond assez amère et virulente mais malgré tout touchante. Une vision forte de l'homme et de la société... le tout déguisé sous une écriture facile. Le Grand Livre se lit d'une traite.
C'est aussi le récit de la rencontre entre Kivrin, une femme de notre temps, et la société de l'époque, ainsi que la maladie, la souffrance et la mort... Alors j'avoue que c'est un beau livre, dont l'humanité se dissimule sous un vernis d'ironie brillante !
Un livre qui rend honneur à la science-fiction. Ne serait-ce que pour découvrir Connie Willis.

Note : 9/10
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dgrv



A propos de ce livre :

- Prix Hugo 1993, Prix Nebula 1992, Prix Locus 1993.

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