Caïn l'Obscur - L'Opéra de sang 3
(Darkness, I)

Troisième et dernier tome de l'Opéra de Sang, Caïn l'Obscur conclue en apothéose cette somptueuse trilogie macabre et dérangeante sur une sombre et étrange famille ancestrale de vampires. Mais ici, comme vous l'avez compris si vous avez lu les tomes précédents (ce que je vous conseille chaudement avant de lire ces mots !), point de créatures sanguinaires et assoiffées de sang chaud, mais bien plutôt des êtres millénaires et solitaires, renfermés sur leurs coutumes et sur les membres qui composent la Famille. Des vieillards feutrés et surannés qui redeviennent parfois énigmatiquement de jeunes beautés, mais qui restent pour toujours des êtres concentrés sur leur désir de perpétuer par la consanguinité la lignée immuable des Scarabea...
Nous quittions donc Rachaela dans les bras d'Althène, la superbe femme-homme dont elle attend maintenant un bébé. Le coeur de Rachaela se serait-il de nouveau ouvert à l'amour ? Mais le Festin des Ténèbres nous avait aussi et surtout laissé sur la Mort de Ruth, poignardée en plein coeur par une femme folle de désespoir depuis que la sombre jeune femme ait assassiné cruellement et sans raison son compagnon. Ruth est morte. Mais elle était déjà morte au fond d'elle-même le jour où Malach l'avait abandonnée, Malach le guerrier aux longs cheveux blancs qui avait su l'aimer pour la première fois.
Alors qui est le bébé aux longs cheveux de glace auquel Rachaela donne bientôt naissance ? Un bébé qui à l'âge de deux ans en parait déjà plus de dix-sept et qui porte sur son coeur une étrange marque bleue en forme de cicatrice, souvenir d'une blessure survenue quelques années plus tôt sur une autre jeune femme. Anna serait-elle Ruth, revenue d'entre les morts parmi les siens ? Et pourquoi des enfants "élus" disparaissent-ils de part le monde, enlevés par Caïn pour faire d'eux ses "enfants" ? Caïn est-il un Scarabea lui aussi ? Le premier peut-être ? Mais c'est le jour où Anna sera enlevée à son tour que les événements vont se précipiter et que ce troisième volet nous plongera dans un délicieux tourment de haine, de sévices, de volupté et de vengeances millénaires. A savourer !

Caïn l'Obscur laisse cette fois Rachaela de côté et c'est Althène et Malach, chacun de leur côté, qui vont partir à la recherche d'Anna. Rachaela restera quand à elle cloîtrée dans sa maison londonienne, prisonnière de ses démons et de son penchant de plus en plus présent pour l'alcool. Le fantôme de Ruth plane sans cesse sur ce roman et c'est cette fois vers l'Egypte et ses divinités que nous nous envolons. Une Egypte légendaire et mythique recrée avec soin, qui place désormais les Scarabae dans une lignée bien connue, celle des Dieux Egyptiens.
Anne Rice avait déjà fait remonter les vampires aux Fléaux d'Egypte et Tanith Lee surenchérit donc ici sur un autre ton, avec un autre propos sur cette mythologie vampirique savamment élaborée. Le mythe s'enrichit, subit de subtiles variations et ce troisième tome fait preuve de beaucoup plus de rythme que ses prédécesseurs. C'est un bien et en même temps une déception car il est quelque part assez triste de clore l'Opéra de sang sans avoir pu retourner dans la Demeure, entouré de Sasha, d'Eric et de Miranda, au coeur de cet univers feutré et puissamment évocateur. Beaucoup de questions trouvent ici leurs réponses mais nous quittons nos compagnons avec encore beaucoup de clés manquantes. Mais les vampires ne livrent que très difficilement leurs secrets, c'est bien connu...
La narration est une fois encore savamment entrelacée et Tanith Lee nous offre pour ce dernier volet une structure très travaillée. Le style est comme toujours impeccable et c'est vraiment avec regret que l'on quitte les Scarabea. L'Opéra de sang est vraiment un cycle dérangeant, très particulier et troublant, mais vraiment très bon. L'élégance et la démesure sont reines au royaume des Scarabea et Tanith Lee a su écrire ici une splendide variation sur le thème des vampires en évitant tous les pièges et les clichés du genre. Ici, pas d'horreur ou si peu, mais tant de perversion dans cette danse macabre et enjôleuse que tous les codes sont malmenés pour notre plus grand plaisir. L'Opéra de sang est une trilogie à lire et Caïn l'Obscur la clôt avec une grande maestria qui ne rend que plus vive la tristesse de l'abandon. Un grand moment !

Note : 7,5/10
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Chaperon Rouge



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