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#1 2010-11-24 16:09:17

Stegg
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[Interview]Sam Nell

Réalisé avec la participation de Chapie


San Nell est l'auteur de "Chevaucheur d'Ouragan", un excellent roman de fantasy jouant avec les codes du genres paru en aout dernier.



http://www.mnemos.com/JOOMLA2/images/auteurs/Sam_Nell1.jpg


Bonjour ! Tout d'abord, merci d'accepter de répondre aux quelques questions de Psychovision. Chevaucheur d'Ouragan est votre premier roman publié et je commence donc par une question classique, est-ce que vous pourriez vous présenter à nos lecteurs ?

Mmmmmm...

Un portrait-robot ?
Coiffure de Dark Vador + lunettes de l'Agent Smith + moustache de Bill « The Butcher » Cutting + sourire du Joker...

Quelque chose de plus physionomique ?
Je suis gaulé comme Sébastien Chabal avec le charme de Tom Cruise.
Ou peut-être l'inverse...

Des détails pratiques ?
Je chausse du 41, j'utilise des brosses à dents à poils durs et je ne dors jamais sur le dos.
Mais tout le monde s'en fout...

Un penchant inavouable ?
Je rêve de faire un jour pour les loups-garous ce qu'Anne Rice a fait pour les vampires.
Et peut-être aussi de leur offrir Stephenie Meyer en pâture...

A part ça, vraiment, je vois pas.

Comment sont nés les personnages et l'univers de Chevaucheur d'Ouragan ? Quelle a été votre processus de création pour donner naissance à cet ouvrage ? Avez-vous par exemple effectué des recherches sur le fonctionnement des navires afin de rendre crédible l'équipage du Souffle de l'Âme ?

Depuis que je suis gosse, j'ai toujours rêvé d'être corsaire. Et puis avec l'âge, j'ai découvert l'histoire de la piraterie, son idéologie et ses « lois ».Ça n'a jamais fait l'ombre d'un doute dans mon esprit, si j'avais vu le jour 250 ans plus tôt (et que je n'avais pas le mal de mer en prenant mon bain) j'aurais été un Frère de la Côte !
Les personnages de Chevaucheur d'Ouragan sont nés de ce fantasme. Et des lectures qui l'ont alimenté, au fil des années. Mais il a évidemment fallu faire des recherches pour étoffer l'imagerie autant que pour la crédibiliser. Je remercie d'ailleurs au passage Renaud Maroy dont le jeu de rôles, Pavillon Noir (en accès libre sur le net), est un véritable trésor sur la flibuste.

La quatrième de couverture cite Michael Moorcock comme référence mais votre roman joue aussi la carte de la mythologie avec les Atlantes et les Minotaures. Quelles ont été vos influences réelles pour ce roman ?

Mes influences...
Nombreuses. Variées. Et sans doute inconscientes pour beaucoup (ce n'est pas moi qui aie pensé à Moorcock, même si la référence est particulièrement pertinente) . C'est très difficile de citer tout ce qui me traînait dans la tête en écrivant ce roman, mais si je devais essayer, je dirais : de Homère à Albator, en passant par Guy Gavriel Kay, John Milius (pour le Lion et le Vent plus que Conan), Pirates des Caraïbes, Tombstone,Yslaire, Bourgeon ou Sorel... En gros, j'ai abondamment pioché dans tout ce que j'aimais et délibérément écarté tout ce qui me gonflait (en m'autorisant parfois quelques clins d'œil : il y a plusieurs répliques empruntées directement au cinéma dans le roman).

On sent ceci dit que vous prenez de grandes libertés avec la mythologie, que vous ne cherchez pas à simplement la reproduire, mais plutôt à lui inventer de nouvelles histoires. Voyez-vous plus la mythologie comme un vivier de personnages et de lieux que quelque chose de figée auquel on n'aurait pas le droit de toucher ?

Au-delà de mon imaginarium personnel évoqué ci-dessus, il y a eu, effectivement, une réflexion  sur les références, qu'elles soient mythologiques, historiques, géographiques ou anthropologiques.
L'articulation s'en est faite en deux temps.
Je voulais d'abord un univers foisonnant par opposition à certaines sagas où j'avais toujours eu l'impression que l'auteur se contentait de développer une bulle qu'il déplaçait en même temps que l'histoire tandis que le reste de son monde semblait figé dans l'ombre des projecteurs. Je demande d'avance pardon à tous les fans de Robin Hobb, mais c'est en lisant l'Assassin Royal que j'ai eu cette sensation de la manière la plus flagrante.
Ensuite, j'ai toujours été bluffé par le travail formel de Guy Gavriel Kay. Ces "achronies" (je me sens obligé d'inventer un mot pour décrire son exercice de style) ont une puissance romanesque qui me fascine et une efficacité qui n'a jamais cessé de m'intriguer. Et il m'a semblé qu'au-delà même de son talent narratif ou dramatique, il y avait dans son procédé une intelligence qui mettait en valeur ce que beaucoup d'univers de fantasy n'arrivaient plus à faire en essayant systématiquement de tout réinventer à partir de rien alors même que le vivier de ces créations restait toujours le même : mythologie, histoire, géographie, anthropologie... Et je me suis rendu compte, en tant que lecteur, que j'étais un peu fatigué de devoir, chaque fois, avaler cinquante pages de noms imprononçables avant d'entamer une histoire qui aurait peut-être gagné en lisibilité à afficher clairement ses influences ; et que je trouvais de plus en plus mon plaisir dans des univers ouvertement référencés : uchronies en tout genre, les "achronies" de Kay, la chevalerie anglaise de  J.R.R Martin pour n'en citer que quelques exemples...
J'en ai tiré la conclusion, très personnelle, que je serais plus efficace si j'offrais au lecteur une grille de lecture dans laquelle il puisse se repérer facilement. C'est de là qu'est venue l'idée d'utiliser des références parfaitement reconnaissables tout en m'offrant le plaisir jubilatoire de les réinventer complètement pour les rendre cohérentes entre elles et les faire résonner avec les thèmes du roman. Cerise sur le gâteau, le champ des possibles était quasiment infini...

Votre roman a également ses propres créatures originales tel Abel de Tyr, un Arkange cyclonide sur lequel personne ne peut lever la main sans mourir immédiatement, mais qui ne peut attaquer quelqu'un sans perdre son don. D'où vient cet étrange personnage, finalement assez atypique dans l'héroic fantasy ?

Depuis l'origine, ce qui m'intéressait surtout concernant Abel, c'est ce qu'il allait devenir (si j'en dis plus, je risque le spoiler...), or pour mettre en valeur le point de chute de cette trajectoire, il fallait un point de départ. Je voulais un anti-héros, je l'ai donc construit de toutes pièces, mais avec des ressorts de fantasy. En l'occurrence ce Don/malédiction implanté chez ses esclaves par la Maison Cyclon. L'Empire Atlante se devant d'être un modèle de décadence, ce colonialisme mâtiné d'eugénisme s'est imposé de lui-même parce qu'il était efficace, visuel et finalement très moderne...

Il y a également les Avires, les fameux vaisseaux atlantes au centre de l'histoire, qui donnent parfois un coté aventures maritimes au roman. Comment les avez vous conçu ?

Le postulat de départ était justement d'écrire un roman d'aventures corsaires, mais à ma sauce. Une fois que le cadre formel était posé (référencement affiché), il est devenu clair qu'il fallait que je réinvente ma propre piraterie. Le "bateau volant" est presque un poncif des littératures de l'imaginaire, j'ai donc essayé de me le réapproprier en gardant au maximum l'imagerie et l'ambiance de l'âge d'or de la flibuste des XVIIème et XVIIIème siècles.

Finalement, on peut dire de Chevaucheur d'Ouragan que s'il utilise quelques stéréotypes, il essaie aussi de sortir la fantasy des sentiers balisés qu'on lui fait souvent prendre. Etait-ce important pour vous de l'amener vers des nouveaux chemins ? Comment voyez-vous l'avenir du genre ?

J'aurais l'air extrêmement prétentieux si je répondais par l'affirmative à cette question. Je pense  simplement qu'il n'y a pas beaucoup plus d'intérêt à réécrire ce qui a déjà été fait (le plus souvent avec talent) qu'à le lire pour la énième fois.
J'avais évidemment moi-même une tonne d'aspirations en me lançant dans ce projet, mais pour un primo-auteur, c'est toujours difficile de faire la distinction entre les ambitions véritables et la gloriole fantasmée. Je préfère donc pudiquement garder pour moi ce cahier des charges et laisser le lecteur juge du résultat. Il y a cependant une tendance dans laquelle je m'inscris volontiers et que l'on sent chez un certain nombre de jeunes auteurs (Laurent Poujois par exemple pour n'en citer qu'un) : écrire un peu comme au cinéma (effets visuels, procédés narratifs, actions, dialogues)...

Pour la promotion de Chevaucheur d'Ouragan, vous avez créé un bande-originale sur Deezer avec des morceaux de musique de films et de jeux vidéos. Est-ce que la musique a eu une part importante dans votre processus créatif ?

Pour être précis : j'ai plutôt « recomposé » une bande-originale du roman à partir de bandes-originales de films et de jeux vidéos que j'ai sélectionnées, ordonnées et alignées sur le rythme du récit en essayant d'imaginer une cadence de lecture moyenne.
Sinon, effectivement, quand j'écris, la musique m'est aussi indispensable que le Coca Light. Et pour être honnête, elle intervient même très tôt dans le processus. Mes meilleures idées me viennent allongé par terre, dans le noir, pendant que tout le monde dort, avec un casque sur le crâne, dans lequel This Will Destroy You me hurlent des accords post-polcalypto-rock. Ensuite, je m'immerge dans une ambiance particulière avec une sélection de bandes originales calibrées à dessein. Je choisis un morceau, que je m'assène à tue-tête à chaque début de séance d'écriture, et à la fin de ce conditionnement, la musique acquiert la force d'un mantra. Il me suffit de poser les écouteurs sur mes oreilles et dès les premières notes, je suis propulsé dans l'histoire comme un obus, explosif et mélomane... Je n'arrive pas à concevoir l'inspiration comme un papillon qu'on attend de voir se poser, mais plutôt comme une saloperie de vieux sanglier qu'il faut rabattre à grands coups de décibels...

Pour ce roman, vous avez créé un site, ouvert une page Facebook et un compte Twitter. Vous participez activement à la promotion de votre roman sur internet. Est-ce que pour vous cela fait désormais partie du travail de l'auteur à l'heure du numérique ? Et comment s'est passée votre rencontre avec votre éditeur, Mnémos ?

La convergence numérique offre aujourd'hui des opportunités d'augmenter la réalité créée par l'auteur. C'est une tentation à laquelle il est difficile de résister et on peut faire beaucoup de choses avec un peu de détermination et pas mal de débrouillardise. C'est peut-être l'enthousiasme du premier roman, mais j'avais effectivement des idées plein la tête et envie d'explorer au maximum tout ce qui tournait autour de l'objet-livre, au-delà même de sa réalisation.
Je me permets d'ailleurs de préciser que vous oubliez quelques unes de ces expériences : mise en ligne du prologue, en eBook et en audiobook, mais surtout l'initiative dont je suis le plus fier sur ce projet (même si je n'ai fait qu'en superviser la conception), c'est la bande-annonce de Chevaucheur d'Ouragan, disponible sur le site et réalisée grâce aux miracles du dessin vectoriel et au talent d'une joyeuse bande de francs-tireurs.
J'ai rencontré Charlotte Volper (mon éditrice préférée) par l'intermédiaire de Xavier Mauméjean et au départ, je crois qu'elle a dû se dire que je rêvais un peu en couleurs. J'arrivais presque chaque jour avec une nouvelle idée. "On pourrait faire ça. Et puis ça. Et pourquoi pas ça non plus ?" Mais elle, et toute l'équipe de Mnémos, m'ont fait confiance et quand ils ont vu que je pouvais délivrer, ils m'ont même carrément encourager.
Je ne sais pas si "ça fait désormais partie du travail de l'auteur", mais c'est indéniablement un nouveau terrain de jeu pour ceux qui ont envie de faire vivre leur univers un peu différemment.

Une question un peu plus d'actualité, le livre numérique semble sur le point d'arriver en France. Qu'en pensez-vous en tant que lecteur et en tant qu'auteur ? Vous y voyez une bonne ou une mauvaise chose ?

J'y vois un avenir incontournable et des opportunités incroyables. Mais le livre doit tirer les bonnes leçons de ce qui est arrivé au disque et au film : oublier les combats d'arrière-garde, ne pas avoir peur, aller de l'avant, inventer des nouvelles formes de contenu et de service.

La fin très ouverte de Chevaucheur d'ouragan laisse supposer une suite. Est-ce que vous y pensez ? Quels sont vos projets ?

Oui, j'y pense. Très fort. Allongé par terre. Dans le noir. Avec les accords tonitruants de This Will Destroy You... Il y aura bien une suite. Atlantys réserve encore quelque belles surprises à Trestan Vortigern, vous n'aurez jamais vu Abel aussi truculent que quand il touche le fond, quant à Drago et Shi'ndra, leur « belle » histoire ne fait que commencer...

Sinon, je viens de terminer une nouvelle qui s'intitule « Le Deuxième Œil » pour l'anthologie Victimes et Bourreaux des Imaginales. Elle met justement en scène la première rencontre entre Drago Ilianar et Tao Wang Li (la malheureuse qui a précédé Shi'ndra entre les griffes du pyromant). Âmes sensibles s'abstenir...

Et puis je continue de travailler sur un polar financier dans l'univers impitoyable des salles de marché, qui n'a malheureusement rien d'imaginaire...

Je vous remercie d'avoir bien voulu répondre aux questions de Psychovision. Et je vous laisse donc le mot de la fin.

Certains Princes Vortex le diront mieux que moi : "Tout ce merdier pour le repos d'une lignée de vieux spectres décadents, nous ne valons guère mieux que les Félons..."


A propos de cette interview :


Site du roman : http://www.chevaucheurdouragan.com/
Page facebook de l'auteur : http://www.facebook.com/pages/Sam-Nell/133237760023912
Bande annonce de « Chevaucheur d'ouragan » : http://www.youtube.com/watch?v=9JS0qsufMq0

http://www.mnemos.com/JOOMLA2/images/couvertures/Bermes/Chevaucheur-bd.jpg


Vous ne pouvez pas construire un monde meilleur pour les gens. Seuls les gens peuvent conduire un monde meilleur pour les gens. Sinon, c’est juste une cage. Terry Pratchett
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