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#1 2010-10-01 16:57:45

BernardMenez
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Date d'inscription: 2008-07-29
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[C] Le pigeon d'argile [Donald E. Westlake - 1965]

http://img299.imageshack.us/img299/9684/pigeondargile.jpg

Le pigeon d'argile
(The Fugitive Pigeon)

Auteur : Donald E. Westlake
Pays d'origine : Etats-Unis

Genre : Polar ironique / Comédie
Année : 1965

Editeur : Gallimard
Collection : Série noire


Si "Le pigeon d'argile" n'est certes pas le plus grand roman écrit par l'excellent Donald E. Westlake, il n'en demeure pas moins l'un de ses plus importants.
En effet, Westlake écrit de solides romans policiers depuis le début des années soixante. Solides mais encore un tant soit peu impersonnels puisqu'encore sous l'influence d'autres auteurs du même genre, à savoir William Irish ou Dashiell Hammett ; des écrivains qu'il adore au point de rester encore jusqu'à cette année charnière, sous leur joug.
Comme celui-ci le déclarait lors d'une interview accordée en 2006 à un journaliste français, "s'il n'était le plus drôle dans sa vie de tous les jours, il était en revanche toujours le copain du plus drôle", de ceux qui font des gaffes à foison, et qui, sans s'en rendre compte parviennent à devenir attachant à force de naïveté ou de maladresses.
"Le pigeon d'argile" décrit un personnage au caractère tellement gaffeur, que la comédie ironique humaine prend presque le dessus sur le polar lui-même. Un humour dont ne se séparera plus ensuite Westlake, et qui fera à la fois sa renommée et son style. Un style qu'il trouve donc ici pour la première fois et qu'il ne quittera dès lors plus. Comme il le disait si bien lui-même également : "après le pigeon d'argile, je ne me suis plus retourné".

De quoi retourne t-il donc ?
Charles Robert Poole n'est pas doté d'une intelligence extraordinaire. Celui-ci n'a jamais voulu accepter les emplois que sa mère lui proposait, conscient de sa propre incapacité, et ne voulant pas discréditer en cela sa chère maman et son haut poste. Ainsi, ne tenant pas plus de quelques jours ou quelques semaines dans les postes qu'on lui confiait et pour lesquels il postulait lui-même, il a finit par accepter l'offre de son oncle Al : celui de travailler comme barman au Rockaway Grill, un petit bar déserté d'une ruelle new-yorkaise.
Un travail facile, qui lui permet de regarder de vieux films policiers à la télévision. En échange de cet emploi, la seule chose que son oncle lui ait demandé, c'est de réceptionner quelques colis douteux puis de les remettre à des quidams louches venant ensuite les chercher. Charlie, ça ne le dérange pas du tout. Du moment que son travail n'est pas fatigant et lui permet de rêvasser, pas de problème ! Seulement voilà qu'un jour, un problème en chair et en os se pointe ! En fait de problème, il s'agirait même de deux, puisque ce sont deux tueurs à gage qui en veulent à sa peau !
Charlie sait bien à qui sont destinés les paquets qui transitent dans son bar ; toujours est-il que cela ne lui demandait aucun effort jusque là. Oui, mais voilà qu'il s'aperçoit que la raison pour laquelle on veut l'éliminer, est que l'Organisation qui fait transiter ces colis, le prend pour une balance. Première chose à faire : fuir ! La seconde : remonter la filière afin d'expliquer en haut lieu qu'il n'est pas coupable des fuites qui lui sont imputées et qu'il n'y a donc aucune raison de le liquider.
Bizarrement, sa naïveté va foutre un bordel monstre dans une organisation criminelle qu'on qualifiera alors pour le moins, de désorganisée !

"Le pigeon d'argile" précède "Le Pigeon récalcitrant" (1967), qui n'est pas une suite malgré ce que pourrait laisser penser son titre, mais qui lui aussi met en scène un personnage naïf, lequel se fait constamment arnaquer avant d'hériter de la somme monstrueuse de 317.000 dollars d'un oncle inconnu. notre antihéros sera à deux doigts de se faire une fois de plus arnaquer par un Gang, sauf que de fil en aiguille, l'arnaqueur finira arnaqué par notre candide, ou, plus familièrement dit : le pigeonné ne sera pas celui que l'on croit.
Dans "Le pigeon d'argile", c'est idem. Ce à quoi on assiste, c'est à une variation sur le thème de Candide. Un candide au pays des gangsters et dont la naïveté finira par embrouiller tout le monde. Le tout teinté d'une drôle de morale, laquelle consisterait à nous dire que la simplicité, pour ne pas dire le simplisme, finit toujours par payer.
Les aventures de Charlie Poole sont ici contées sur un rythme autant frénétique que le ton y est humoristique et même sarcastique. Finalement, les êtres les plus sûrs d'eux-mêmes paieront leur vanité, tandis que l'homme ordinaire pourrait bien sortir tout à la fois grandi de cet imbroglio en même temps que de révéler au yeux du lecteur une véritable noblesse d'âme.
Drôles et même souvent irrésistibles, les aventures de Charlie se suivent avec un intérêt qui ne se dément pas. Oeuvre à la fois légère mais plus profonde qu'on pourrait le croire de prime abord, si elle n'égale pas d'autres romans noirs plus tardives, écrites au sulfure par Westlake ("Le couperet"- 1999, "Le contrat"- 2000), ou si l'humour n'y est pas encore aussi dévastateur que dans sa série des John Dortmunder ("Pierre qui brûle", "Jimmy the Kid",...), la truculence est de mise, et sans doute déjà présente pour cacher le pessimisme foncier de son auteur. Finalement le rire et l'ironie semble avoir toujours servi d'échappatoire à ce grand écrivain mélancolique.
"Le pigeon d'argile" demeure en 1965, encore de le domaine de l'espoir. On sent bien la noirceur poindre ici et là dans ce très sympathique roman ; une noirceur qui ne cessera de s'accentuer par la suite. En tout état de fait, cette première figure de style reste indispensable pour bien se plonger dans l'univers si personnel de Westlake. Et puis pourquoi refuser de se prêter à un jeu qui vous donnera, au minimum, la banane au lèvres ?


Note : 7/10

P.S : A noter que Donald E. Westlake est également l'auteur du scénario du film "Les arnaqueurs" réalisé par Stephen Frears en 1990 et l'une des toutes meilleures adaptations d'un roman de Jim Thompson à l'écran.

Dernière modification par BernardMenez (2010-10-01 17:16:33)


Bernard hein, pas Nanar !

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#2 2010-10-01 17:45:04

Chaperon Rouge
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Re: [C] Le pigeon d'argile [Donald E. Westlake - 1965]

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Merci  Mallox !

c'est la semaine du polar sur Psycho, c'est chouette !


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