Atalante
Atalante est encore un bébé lorsqu'elle est abandonnée au fleuve, sacrifiée par son père pour apaiser la colère des Dieux. Mais l'enfant va être recueillie par les Déesses Artémis, Hécate et Aphrodite. Touchée par la détresse du nourrisson, elles vont chacune lui faire un don avant de confier le berceau aux créatures de la forêt sacrée. Pour Aphrodite, se sera la beauté et la séduction, pour Artémis se sera la robustesse et la vivacité, tandis qu'Hécate lui fait le don d'une vitesse de course inégalée et d'un caractère de cochon. Mais Héra, la déesse jalouse, vient se mêler à la petite cérémonie et vient la nantir d'une impossibilité à connaître l'amour : personne ne pourra jamais posséder la farouche Atalante... Leurs voeux faits, elles laissent la petite à la volonté du fleuve afin de la laisser grandir au cœur de la forêt où elle sera élevée par une ourse. Pourtant, un seul petit détail cloche : personne n'a pensé à lui faire don d'intelligence... Pauvre Atalante !
La petite fille va donc grandir au milieu de la forêt avec ses amis satyres et autres créatures fabuleuses. Jusqu'au jour où sa mère ourse sera tuée par des chasseurs et qu'elle sera enlevée par les Hommes. Atalante va donc devenir femme dans cette Grèce antique toute de mythologie et de folklore et Crisse ressuscite donc dans ce premier tome la légende du livre de la jungle dans un univers cette fois-ci mythologique et humoristique (ce qui n'empêche pas pour autant certains très beaux moments de tendresse ou des scènes particulièrement poignantes). Mais c'est ici les Argonautes qu'Atalante va rencontrer une fois adulte et elle va devenir très rapidement au fil de l'intrigue la seule femme à bord du navire, la seule femme qui ait jamais pu accompagner Jason dans sa recherche de la toison d'or. Et quelle femme ! Une beauté sculpturale montée sur un caractère infernal et sur un esprit de contradiction bon à désarmer jusqu'au plus vaillant des argonautes (et ce n'est pas Héraclès ou Méléagre qui me contrediront !). Alors si vous la faîtes accompagner de Pyros, jeune faune malicieux et meilleur ami depuis son enfance dans la forêt, les aventures de nos compagnons risquent de devenir extrêmement croustillantes !
Atalante est une série vraiment originale et très drôle : le détournement de la mythologie antique est vraiment truculent et le caractère d'Atalante vient ponctuer les trois tome de la BD de passages à hurler de rire. Au début, lorsque j'ai découvert le dessin de Crisse, extrêmement coloré et avec une insistance notoire sur la plastique d'Atalante, je me suis dit : "Oh là là, encore une BD machiste avec une nana à gros sein sans cervelle pour faire baver mes mecs..." Et bien non ! Oui, Atalante est une jeune femme à se damner, oui Atalante est une vraie blonde, mais Atalante est surtout une jeune femme avec un sens de la répartie à faire pleurer et une castratrice née ! Et finalement je trouve qu'Atalante est peut-être plus féministe qu'autre chose ! On rie, mais le plus souvent aux dépends des hommes (sous le crayon de Crisse, des braves gars au grand coeur un peu rustres et qui ne pensent pas beaucoup, sinon avec la partie basse de leur anatomie...). Le talent de Crisse dans cette bande dessinée est ainsi d'avoir su jouer du paradoxe entre ces deux aspects sans tomber dans l'excès ou dans la caricature. Cela rend tous les personnages extrêmement attachants et j'adore !
Les personnages vont plonger dans des aventures vraiment trépidantes à très forte résonance mythologique : transformations des hommes en animaux sur une île où les femmes sont désormais les seules à régner, énigmes du sphinx, centaures en rébellion contre une punition divine etc. Crisse nous emporte très loin avec intelligence et pour moi, cet aspect marche tout à fait. Cette réécriture de la mythologie est vraiment excellente et donne un caractère unique à la série. On n'évitera pas quelques longueurs, mais globalement, Atalante est de très bonne facture. C'est classique dans le dessin et dans le cadrage (de petites planches sans grande originalité à quelques exceptions près), très coloré (même parfois trop notamment dans le tome trois avec la colorisation de Frédéric Besson) mais cela colle à l'intrigue et aux folklore grec très chamarré.
L'humour est présent à chaque page, parfois d'une très grande finesse, parfois dans la lourdeur à deux doigts du franchement grivois, mais c'est globalement très sympathique. Le tome 2, Nautiliaa vient en plus ajouter une touche de gravité et de tristesse par le biais d'une belle histoire d'amour entre une jeune femme et son compagnon transformé en dauphin. Ces deux amants subissent la punition infligée aux autres hommes jaloux et colériques et sont ainsi le jouet de puissances qui les dépasse. Un très beau passage qui ressuscite le thème de certaines tragédies antiques (bien que la tragédie soit bien vite modérée par les remarques d'Atalante...). A noter aussi les déesses, jubilatoires à souhaits : Aphrodite en premier en blonde superficielle et idiote ! Les querelles divines sont bien rendues et on s'amuse de voir ici revisitées toutes les vieilles légendes sur les conflits divins. Personnellement j‘en redemande ! En plus de cela, une belle leçon de solidarité et de franche amitié. Parfois, les bons sentiments c'est agréable aussi...
Au final, la série Atalante est à mes yeux vraiment très bonne. Je sais que beaucoup ne partagent pas cette opinion, mais je l'assume pourtant à 100 pourcent ! J'adore le personnage ainsi que l'intrigue et certaines répliques me font hurler de rire. Et je maintiens qu'Atalante fera plus rire les femmes : elle est trop forte, cette guerrière! Mais à tous, si vous voulez passer un bon moment et retrouver les bases de vos cours de mythologie antique dans une version moins soporifique, n'hésitez pas à faire un plongée dans l'univers d'Atalante, vous ne le regretterez pas !
Il existe trois tomes aux éditions Soleil :
Tome 1 : Le Pacte - 2000
Tome 2 : Nautiliaa - 2002
Tome 3 : Les Mystères de Samothrace - 2003
Note : 8/10
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